Début du roman autobiographique de Jacques TRUDELLE(environ 200 pages papier)
Reviens!Reviens!...Criait la troupe.(Alphonse Daudet)
Pendant que l'eau des pates torsadées chauffait sur la petite plaque de la cuisihière électrique,Jean Durtelle, légèrement accoudé à l'appui de sa fenetre de droite, regarde ce qui se passe dans la rue, deux étages au dessous de lui.Il regarde et il écoute, car cette rue du centre de Perpignan, si étroite qu'on est tout étonné de voir, une ou deux fois par mois, une voiture s'y faufiler(en toute légalité d'ailleurs), donne sur la crane place des Poilus, habitée chaque matin par le brouhaha d'un marché aux légumes.Dans l'air léger, des appels se croisent, des plaisanteries fusent, des moteurs expriment leur soulagement ou leur impatience.On va, on vient, on repart, on commente, on discute, on bavarde, on vend et on achète avec l'enjouement de rigueur.
Mais sous les yeux de Jean Durtelle, dans sa rue, se dirigeant sans conviction vers la place, passe un piéton mélancolique.Et ce que vit notre observateur pénétra si profondément dans son ame qu'une exigence intérieire le poussa irrésistiblement à écrire les lignes suivantes:
"Le pas était plutot triste et hésitant,
Le dos légèrement vouté,
Le regard assez vague.
La vie paraissait sans objet,
Sans grand intéret,
Comme un ciel fade
Sans soleil et sans pluie.
Or, melée à quelques débris végétaux,
Libérée par hasard du circuit commercial,
Une carotte
Attendait paisiblement son destin.
Et le pas s'est accéléré quelque peu,
Animé,
Puis, la jambe gauche ayant servi d'appui
Celle de droite ayant pris son recul,
Pied levé,
L'innocent légume a bondi de quelques mètres
Propulsé par un shoot efficace."
La suite prochainement,
Sylvie Trudelle-Ferrer.,
